"Plus les hommes seront éclairés, plus ils seront libres."
Voltaire
Les écrans, la science, la vérité, la philo et moi!
Un article d'Alexandra Ibanès, enseignante en cycle 3, pratiquant la philo pour enfants en classe depuis près de 20 ans
(Pour en savoir plus sur Alexandra, lire son portrait "La philo pour enfants a changé mon métier d'enseignante": cliquer ici)
La désinformation ou fausse nouvelle appelée communément « fake news » n’est pas une nouveauté. Rumeurs, propagandes, calomnies font florès depuis la nuit des temps par le biais de l’art, de la chanson populaire, des livres pamphlets…
Actuellement, selon Big Data, l’humanité produit tous les deux jours autant d’informations qu’elle en a diffusées de l’aube de la civilisation à celle de notre millénaire. Cette progression exponentielle qu’autorise la technologie d’internet interroge sur la fiabilité des données diffusées par des réseaux de plus en plus puissants. Comment démêler le vrai du faux d’une information ? Comment savoir si nous ne sommes pas manipulés ?
Constat
Aujourd’hui, les réseaux sociaux, qui ont l’avantage de la rapidité, semblent prendre le pas sur la presse écrite qui était naguère une source incontestable de diffusion de l’actualité dans tous les domaines. Les posts diffusés en temps réel par Twitter ou Facebook se substituent aux filtres des agences traditionnelles de communication. À l’ère du numérique, tout peut circuler librement sans vérification ; n’importe quelle nouvelle peut être légitimée et acquérir un statut d’information sans avoir été vérifiée. Ainsi,en circulant très vite, et en étant partagés, de nombreux articles se substituent à ceux des experts et des critiques professionnels (cinéma, restauration, médecine, littérature, éducation, enseignement…) pour créer une nouvelle « vérité ».
À travers la multiplicité d’informations qu’offrent les médias, les téléspectateurs, les internautes, les auditeurs et les lecteurs se forment leurs propres opinions, ils se construisent LEUR esprit critique et LEUR vérité.
Bref, Fake news, Hoax, Intox, Infox et post-vérité tendent parfois et avec succès à substituer la fiction à la réalité ! Aussi, le principal enjeu de toute éducation consistera désormais à former dès l’école primaire les futurs citoyens à exercer leur esprit critique, à les mettre en garde contre les manipulations, à leur apprendre à démêler le faux du vrai.
Développer l’esprit critique en classe
Pour le chercheur comme pour l’élève préparant un exposé, pour l’écrivain ou pour le simple curieux, les moteurs de recherche internet sont désormais les vecteurs les plus couramment utilisés. Si la mémoire d’un disque dur peut faire office d’une certaine forme d’encyclopédie, d’autres questionnements demandent des réponses plus réfléchies.
Certains élèves se demandent à quoi servent certains apprentissages puisque Goggle ou autres peuvent être consultés chaque fois qu’ils veulent avoir une information. Et bon nombre d’entre eux font se livrent à de simples copiés-collés d’informations pas même reformulées en juxtaposant avec beaucoup de maladresse des idées glanées ici et là.
L’apprentissage d’une lecture d’écran est désormais indispensable au même titre que les apprentissages fondamentaux. L’éducation à l’information avec un esprit critique est désormais devenue un enjeu de société.
En classe, deux notions essentielles devront être mises en avant pour que puisse s’exercer l’esprit critique des élèves.
Dans un premier temps, il s’agira de leur apprendre à distinguer la signification de ce que sont les opinions et les arguments. Dans un second temps, à les amener à comprendre que l’esprit critique (qui n’est pas un jugement défavorable) s’épanouit dans un échange avec autrui en confrontant avec écoute et respect de chacun.
Apprendre à s’interroger plutôt que de demeurer passif face à des préjugés est le premier apprentissage à la notion de liberté de jugement et le premier moyen de résister aux pressions externes.
L’importance d’une éducation à l’esprit critique dès l’école primaire consiste aussi pour l’enfant « à surmonter ses goûts, ses tendances particulières, les pesanteurs de sa propre psychologie pour respecter les règles universelles, c’est à dire pour agir d’une manière qui soit admissible et acceptable par tous », nous dit Canivez.
Apprendre à argumenter sera donc un long travail sur soi pour se libérer de tout ce qui entrave la liberté de penser.
Un travail collectif est aussi nécessaire pour échanger des réflexions.
Une formation de l’esprit critique apprendra aux élèves à résister aux emprises idéologiques, politiques, complotistes, religieuses, etc. qui régissent notre société. Et une initiation à la philosophie permettra aux jeunes penseurs de remettre leurs propres certitudes en question en prenant en compte celle des autres.
Expérience en classe pendant une année.
Licenciée en communication et audiovisuel et très soucieuse de l’usage qu’on peut faire des outils numériques, je fais depuis quelques années beaucoup de prévention dans ma classe autour des dérives d’internet, des modes de communication et de l’information et j’apprends à mes élèves à développer leur esprit critique d’une autre façon.
Pendant une année, j’ai conduit les enfants à avoir une rétrospection sur le rôle de leur cerveau face aux écrans et à comprendre comment ils réagissaient face aux informations qu’ils recevaient pour élaborer une charte de prévention. Toutes les activités, qu’elles soient philosophiques, d’éducation à l’information ou scientifiques n’ont cessé de s’enrichir toute l’année et très rapidement les élèves ont eu un esprit très aiguisé et beaucoup plus critique.
Plusieurs axes interdisciplinaires pour utiliser correctement les écrans et développer son esprit critique.
1. Le cerveau face aux écrans
À partir d’un manuel Les écrans, le cerveau et l’enfant...de La main à la pâte (association fondée en 1996 par Georges Charpak, prix Nobel de physique et soutenue par l’Éducation nationale), la classe a suivi durant une dizaine de séquences un projet d’éducation à un usage raisonné des écrans.
Comme nous pouvons le constater, les écrans rentrent très vite dans la vie des enfants et bouleversent leur quotidien.
À travers des démarches d’investigation, les activités proposées en classe incitaient l’élève à être actif, curieux et critique dans ses apprentissages. J’étais pour ma part tutrice, modératrice et médiatrice.Je proposais aussi une confrontation avec le savoir scientifique, à l’aide de documents.
Ces séances de travail ont été menées de façon individuelle, en petits groupes ou collectivement. Chacune d’elle était structurée de façon rigoureuse avec une phase de questionnement (débat, représentations initiales d’élèves, formulation d’hypothèses), une phase d’activité (recherche de solutions avec expérimentation, observation, classification, recherche, construction) et une phase de structuration avec une mise en commun, une conclusion et une trace écrite. L’objectif final étant d’aboutir à la rédaction d’une charte pour le bon usage des écrans.
La première séance a fait émerger les idées des élèves sur le cerveau à travers des verbes et des mots dont voici la liste : Réfléchir, voir, faire fonctionner les muscles, douleur, écouter, imaginer, dormir, parler, lire, bouger, les émotions, mémoriser, retenir, travailler, faire bouger les parties du corps. Après débat, ces mots ont fait l’objet d’une classification.
La seconde séance a été consacrée aux mécanismes de réaction du cerveau face à différents types d’écrans et aux différents types d’activités.
A/ Images et sons
Les objectifs :
- Découvrir que la vision et l’audition sont sollicitées lorsqu’on interagit avec les écrans.
- Faire réfléchir les élèves à leur coopération pour la bonne compréhension des contenus multimédias.
Nota : Tous les enfants ont participé et se sont passionnés pour cette activité , ils étaient dans l’étonnement en découvrant comment grâce à leurs sens, ils donnaient différentes significations à un film et qu’inconsciemment l’ouïe et la vue les conduisaient à faire des suppositions.
B/ L’illusion du mouvement
L’objectif :
- Découvrir que le cinéma, la télévision et l’animation utilisent certains phénomènes d’illusion virtuelle.
Nota :
Les élèves ont réalisé un folioscope en retirant des images, en les mélangeant, en les mettant dans l’ordre pour créer une illusion de mouvement et comprendre que celle-ci est due à la conjonction de deux phénomènes, l’un rétinien et l’autre cérébral. Ils ont découvert que le cerveau interprétait une succession rapide d’images comme un mouvement continu.
Les élèves connaissaient les phénomènes d’illusion car, parallèlement, j’avais initié une activité cinéma où le mouvement, le trucage et l’illusion avaient été étudiés.
C/ L’espace et l’écran
Les objectifs :
- Réfléchir aux manières de représenter l’espace : les représentations centrées sur notre propre position (autocentrées) et celles centrées sur un point de vue externe (allocentrées).
- Comparer comment l’espace est perçu à l’écran et dans la réalité.
Nota : Tous les élèves maîtrisaient parfaitement leur position dans le cadre d’un jeu vidéo. Tous savaient quel rôle ils jouaient face à leurs écrans. Ils avaient parfaitement conscience d’être extérieurs au personnage virtuel quand ils le déplaçaient sur un écran ou d’endosser le temps d’un jeu le rôle du héros. Ils avaient une parfaite maîtrise du point de vue qui s’offre à eux quand ils jouent. À la fin de la séance, les élèves avaient totalement conscience qu’un jeu est un jeu.
D/ Communiquer ses émotions
Les objectifs :
- Réfléchir aux émotions et à leurs fonctions à l’échelle de l’individu et à l’échelle d’un groupe.
-Travailler les expressions des émotions.
Nota : Au début de l’activité qui était dans le registre du théâtre et du dessin, les enfants ne comprenaient pas l’intérêt de cette séance pour l’écriture de la charte. Après plusieurs activités, ils ont saisi qu’un des rôles du cerveau est de faire ressentir des émotions, de les exprimer et de découvrir celles des autres. Mais que venait faire l’écran dans toute cette histoire ?
La question posée à la classe était de comprendre comment par l’intermédiaire des écrans des personnes malveillantes risquaient de faire du mal aux autres car on ne voyait pas ses réactions. Un débat sur le rôle des smileys et leur utilisation a été fait suite à diverses réactions d’élèves. Ils ont découvert qu’il ne fallait pas les prendre systématiquement pour argent comptant, que celui qui les envoyait pouvait répondre en fonction de ce qu’on attendait de lui sans forcément être sincère vis-à-vis de lui.
Les enfants ont conclu qu’il faut réfléchir à la manière dont on s’adresse aux autres par l’intermédiaire d’un écran.
E/ Le temps à l’écran
Objectif :
- Réfléchir à la façon dont la durée d’un évènement est montrée à l’écran et prendre conscience des manipulations que l’on peut y apporter.
Nota :
Les élèves ont compris que dans un jeu vidéo ou dans un film, on peut manipuler le temps en le raccourcissant ou en l’accélérant. Il ne correspond pas à celui de la réalité.
L’expérience était faite sur un film très court de la germination d’une graine qui donne une fleur ; les élèves à la fin de la séance ont proposé de semer des graines en classe pour justifier leur conclusion.
F / La mémoire et l’écran
Objectifs :
- Faire découvrir aux élèves qu’il y a des souvenirs qui sont personnels et des connaissances qui sont partagées collectivement.
- Faire prendre conscience que les écrans sont de nouveaux moyens pour suppléer la mémoire avec leurs avantages et leurs risques.
Nota :
Les élèves ont appris que les écrans permettent de partager des souvenirs mais qu’ils ne remplacent pas notre mémoire. Il faut connaître les risques par rapport à ce que l’on diffuse sur internet car les publications peuvent être partagées ou utilisées par d’autres sans qu’on le sache et elles restent alors qu’on voudrait qu’elles disparaissent.
Les écrans ne remplacent pas notre mémoire malgré les milliards de données sur les disques durs d’ordinateurs. Les émotions sont totalement absentes de ce type de communication.
G/ Échanger, communiquer
Objectifs :
- Faire prendre conscience aux élèves des différentes formes de communication qui nous permettent d’échanger les uns avec les autres.
- Faire prendre conscience aux élèves des particularités, avantages et risques que représente la communication à distance via internet.
Nota :
La classe devait remobiliser les idées concernant la manière dont les écrans sollicitent les fonctions du cerveau pour exprimer ses pensées et communiquer.
Avec internet, nous pouvons partager avec d’autres personnes, c’est très enrichissant mais nous ne les voyons pas et il est difficile de les comprendre et de savoir qui elles sont réellement. Certaines personnes peuvent tromper leurs destinataires car elles se cachent sous des pseudonymes ou prennent une fausse identité, donc il faut être très vigilant.
Conclusion
Les élèves ont découvert les particularités, les avantages et les inconvénients des écrans qu’ils utilisent régulièrement et ils ont pris conscience de la mise en œuvre de leur cerveau. Il y a eu une véritable prise de conscience du rôle qu’ils devaient tenir face à leur écran qu’ils soient émetteurs ou destinataires de messages.
De nombreuses leçons et pistes de réflexion sont proposées en enseignement moral et civique et en géographie sur internet pour prévenir les élèves des dangers qu’ils encourent derrière un écran. Les discours sont extrêmement préventifs mais ne touchent que partiellement les enfants. Lors des débats qui suivent ces séances, j’entends souvent dire des enfants qui sont de très gros consommateurs d’écran et de réseaux sociaux qu’ils ne se sentent pas concernés, qu’ils connaissent les rouages d’internet. Les « problèmes » n’arrivent qu’aux autres. Avec ces expériences qui ont duré 4 mois, les enfants mis en situation de recherche scientifique ont ressenti les interactions qu’ils avaient avec leurs écrans. En vivant avec leur corps et leur cerveau ce qui se passait dans leurs pensées, le résultat a été positif. Dans leur rapport aux informations, ils seront désormais beaucoup plus prudents (à l’exception de deux élèves sur trente).
Note de l’enseignante. Lors d’un débat sur la violence, deux élèves se sont positionnés, l’une en tant que victime et l’autre en tant que « harceleuse » sur des réseaux sociaux. Le travail sur les émotions a été salutaire et leur a permis de comprendre l’usage qu’elles devaient avoir des écrans en étant dans l’empathie l’une et l’autre. Elles m’ont confié que les leçons sur la prévention sur internet étaient pour elles de la morale et non pas du vécu. En comprenant comment leur cerveau fonctionnait et comment se transmettaient les émotions, elles comprenaient enfin les vrais dangers qui étaient sur la toile.
2. Étude de L’anneau de Gygès
Dans le cadre de la prévention des élèves par rapport aux réseaux sociaux où certains utilisateurs avec des pseudonymes se comportent comme si on ne les voyait pas et peuvent être extrêmement violents, j’ai lu à ma classe L’anneau de Gygès d’après le mythe de Platon de Catherine Vallée (Les Éditions Éveil et Découverte). Gygès est un pêcheur et une personne très respectable qui trouve un anneau qui le rend invisible dès qu’il tourne son chaton et dès lors, il commet les pires méfaits dès qu’on ne le voit plus, la vertu de cet homme n’étant due qu’au résultat du regard que l’on porte sur lui. L’analogie avec les personnes qui se cachent derrière internet a permis de réfléchir sur la civilité dans les réseaux sociaux pour introduire ensuite la démocratie.
3. L’éducation aux médias dès l’école primaire.
Chaque année, le CLEMI (Centre de Liaison de l’Enseignement et des Moyens d’Information) organise pour les enseignants la semaine de la presse. De nombreuses activités sont proposées pour les classes allant du primaire au lycée car s’informer est devenue une compétence aussi importante que savoir lire, écrire et compter.
Durant une semaine, les élèves ont pu découvrir avec des dossiers pédagogiques adaptés les métiers de communication, travailler sur le décryptage de l’information et apprendre à reconnaître des fake news et des hoax.
En parallèle, au même moment Le P’tit Libé proposait un dossier très riche autour des écrans avec plusieurs thèmes dont la méfiance envers les journalistes et deux jeux numériques autour des fake news.
Le premier jeu autour du changement climatique avait pour objectif de dire si les informations proposées étaient fiables, si on pouvait les croire et les utiliser à l’école. Il fallait que les élèves vérifient d’où venaient les informations, les dates, ou encore voir si l’image avait été trafiquée. Le but était d’indiquer si on pouvait croire aux sources.
Le second jeu « Galaxie de l’info » consistait à ce que les enfants repèrent des indices qui leur permettent de rester prudents face aux informations données. Ils pouvaient obtenir un indice ou une aide avant de valider leurs réponses.
Ces deux jeux réalisés collectivement permettaient aux enfants d’argumenter leurs propos et de débattre sereinement pour trouver la solution.
La force de l’image et les débats à visée philosophiques en classe
Ce travail de décryptage de l’information diffusée par les écrans a considérablement enrichi les discours argumentatifs des élèves en classe. Lors d’un travail sur la mémoire pour fêter le centenaire de la Grande Guerre, j’ai proposé entre autres aux élèves quatre poèmes de Guillaume Apollinaire abscons pour des enfants de 10 ans : Carte Postale, Fusée signal, Mutation, Un oiseau chante (« En sortant de l’école : Guillaume Apollinaire », un DVD de 39 min. Studio Tant Mieux Prod. Éditeur et distributeur : France Télévision Distribution. ). Ces textes étaient présentés sous forme de films d’animation et les plans scéniques permettaient une compréhension totale de ce que l’auteur voulait exprimer. Les enfants ont eu une véritable empathie pour Apollinaire soldat et les Poilus en général, ils ont appréhendé la guerre, ses horreurs, ses conséquences d’une façon humaniste et les débats lors des ateliers philo qui ont suivi ont été très riches et marquants pour eux. Ils ont exprimé un jugement critique après avoir ressenti une émotion esthétique et ils ont enrichi leur perception avant de construire leurs jugements.
Quelques mois après, lors d’un débat sur la mémoire, les enfants étaient restés sensibles au sort des soldats de la Première Guerre mondiale, leurs discours montraient combien ils avaient grandi en humanité et en citoyenneté.
CONCLUSION
Il ne faut pas diaboliser les écrans qui appartiennent au quotidien de beaucoup d’enfants dans le monde. Si de nombreuses informations sont tronquées, fausses ou de simples rumeurs, l’éducation à l’image ou à l’éducation des réseaux sociaux est désormais primordiale à l’école. L’outil informatique est une ouverture extraordinaire sur le monde, il faut simplement savoir l’utiliser.
ANNEXE : L’expérience du jeu vidéo, par Tristan Collet-Beneton, 14 ans.
Selon moi, le jeu peut être un art, mais avant tout j’aimerais définir certaines généralités :
- Un jeu peut avoir plusieurs rôles tel que le pur sentiment de jeu (de stratégie par exemple), mais il peut aussi raconter une histoire (comme un film) de manière plus ou moins explicite. Le film nous affiche directement le récit à l’écran tandis que le jeu vidéo peut le cacher de manière vraiment subtile, sous le gameplay.
- L’expérience de jeu (ou gameplay) est l’interaction directe entre le joueur et le jeu créée par l’intermédiaire d’un clavier, d’une manette ou autres accessoires. C’est aussi la manière dont les joueurs les utilisent, de manière à interagir avec l’environnement virtuel qui les entoure.
- L’aspect de simulation est un point souvent oublié, mais il permet au joueur de déterminer dans quel environnement il se situe, si il lui est familier ou non, si il est réaliste ou pas.
À partir de cela, je vais expliquer à ma manière que le jeu vidéo peut être un art.
Premièrement, les graphismes. Le jeu vidéo peut être considéré comme beau, et des exemples, il y en a à la volée : Cuphead et son style cartoon des années 30, Hollow Knight et son trait de dessin unique dans le genre du jeu, Limbo basé sur le noir et blanc à la manière des ombres chinoises et j’en oublie encore… C’est bien sûr un critère subjectif mais qui montre un résultat unique. On peut comparer les graphismes d’un jeu de la même manière que l’on pourrait comparer des tableaux, car on prend en compte le travail fourni et la beauté à nos yeux de l’œuvre.
Un style graphique inventé par le jeu vidéo (le plus souvent montré) est le pixel art (technique basée sur le graphisme à partir de pixels, basée originellement sur les basses résolutions d’écrans) . Peut-on considérer que c’est de l’art ? A mon avis oui, car comme le pointillisme limite l’artiste à créer une œuvre avec des pointillés, le pixel art limite l’artiste à des carrés de couleurs (pixels).
Le jeu vidéo devient aussi un art par ses dérivés, par exemple avec la musique (du fait que dans le jeu vidéo elle possède sa propre évolution), ou encore ses produits dérivés tels que des figurines ou des objets de collections.
Le jeu vidéo est également un art par le fait qu’il transmet des émotions comme n’importe quels autres arts (tels que le cinéma, la musique, la littérature…) avec la plupart du temps l’histoire, mais aussi par des critères subjectifs tels que la beauté ou l’intérêt qu’on apporte à l’œuvre.
Le gameplay peut avoir son importance sur la transmission des sentiments et ainsi les décisions que prend le joueur (des choix cornéliens, le fait de tuer…). Cela signifie qu’il n’est pas obligé d’apporter une expérience positive, comme sur les autres médiums que l’on peut utiliser. Mais alors, quel est l’intérêt de jouer à un jeu auquel on ne va pas forcément trouver notre bonheur ?
C’est généralement une question de première impression. Par exemple, Spooky’s House of Jumpscare a pour but… d’ouvrir des portes dans le but d’atteindre la 1000ème salle, bien entendu. Cela peut paraître ennuyeux, mais ce jeu d’horreur est, je trouve, vraiment réussi par ses points forts : ambiance et musique parfaites pour le genre, événements aléatoires ou non parfaitement organisés, aucune image choquante (ni sang, ni violence) ; tout repose sur la créativité et le gameplay de cette œuvre. Ici, le jeu n’est pas une œuvre pour ses graphismes, mais bien pour son but, son expérience. Et croyez-le ou non, il peut devenir addictif à cause de ses mécanismes bien huilés et il nous pousse à réfléchir et à prendre des décisions.
Le jeu japonais Yume Nikki (réalisé en pixel art) nous fait incarner une fille qui explore ses rêves. Cela paraît mignon mais la protagoniste en question ne peut sortir de sa chambre, et par conséquent ne peut qu’aller dans son lit dans le but de dormir. Une fois dans ses songes, l’exploration des rêves démarre. Ici, réfléchissez : on peut s’accorder que les rêves que nous faisons la nuit sont souvent étranges. Or, ce jeu retranscrit parfaitement ce sentiment. On explore le total des « rêves » que ce jeu propose afin de les découvrir tous, et vivre une expérience très particulière en étant dans la tête de quelqu’un d’autre qui nous ressemble peut -être un peu.
Quand on joue à ce type de jeu, on ne s’inflige pas du mal. On peut apprendre à combattre ses émotions afin de comprendre la vie qui nous entoure et gagner en maturité avec la découverte de ses nouveaux sentiments. Le jeu vidéo transforme de mauvaises expériences en excellentes tout en étant un art qui interagit avec et selon le joueur pour lui faire apprivoiser ses peurs.
© Alexandra Ibanès pour LaboPhilo, 2020.
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Jeu 2. Sur le même principe, les cartes-mots sont empilées faces cachées sur le carré bleu au centre du plateau. Le meneur de jeu en pioche une et la lit à voix haute. Les joueurs doivent poser leur index sur une image du plateau compatible avec l’énoncé de la carte (ex.: "Trouve sur le plateau quelque chose de jaune / quelque chose qui se mange / quelque chose que tu trouves beau / quelque chose qui te fait peur...". Les joueurs doivent argumenter pour expliquer leur choix. Si l’argumentation est jugée recevable, les joueurs marquent un point. Le jeu continue jusqu’à épuisement de la pioche.
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